Inventaire des réseaux d’eau loi Grenelle 2013 : où en est-on en 2019 ?

20 mai 2019

ARP Secteurs

Le décret « fuites » s’applique aux collectivités locales depuis 2013. Il a pour objectif de réduire les fuites dans les réseaux d’eau potable en imposant aux collectivités locales de mieux connaître leurs réseaux et d’avoir un seuil minimum de rendement. En 2015 ont été appliquées les premières majorations de redevances prévues pour non-réalisation des descriptifs détaillés des réseaux et en 2017 celles pour non présentation des plans d’actions de réduction des fuites: elles concernent les services d’eau potable qui n’ont pu acquérir une connaissance suffisante de leur réseau d’eau potable et/ou qui n’ont pas projeté d’actions appropriées pour la réduction des fuites, jugées trop importantes. Ces services sont majoritairement ruraux et de petite taille.

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Pour rappel, la loi Grenelle 2 stipulait que les collectivités locales et leurs établissements étaient tenus de réaliser un descriptif détaillé des  ouvrages de transport et de distribution d'eau potable ainsi qu'un descriptif détaillé des ouvrages de collecte et de transport des eaux usées avant la fin 2013.


Les  collectivités locales rencontraient des difficultés pour établir ce descriptif et satisfaire aux exigences de la loi Grenelle 2. Elles rencontraient notamment les problèmes suivants :

  • Méconnaissance de leur réseau
  • Âge des équipements et des installations
  • Manque de ressources et de personnel
  • Sécurité du matériel et du personnel

Les descriptifs qui leurs étaient demandés devaient notamment comporter :

  • Le plan des réseaux mentionnant la localisation des dispositifs généraux de mesure,
  • Un inventaire des réseaux comprenant :
- Les linéaires de canalisations
- L’année ou, à défaut, la période de pose
- La catégorie de l’ouvrage au sens de la nouvelle réglementation relative aux travaux à proximité des réseaux
- Des informations cartographiques
- Les matériaux utilisés et les diamètres des canalisations

Ces dits-descriptifs devaient être mis à jour chaque année en mentionnant les travaux réalisés sur les réseaux ainsi que les données acquises pendant l’année.

Malgré une meilleure connaissance patrimoniale, le taux de renouvellement des réseaux d’eau stagne

Au-delà de ces inventaires, les collectivités locales doivent veiller au maintien en bon état de leurs canalisations. L’article D213-48-14-1 du Code de l’Environnement indique que lorsque le rendement du réseau de distribution d’eau s'avère inférieur à un certain seuil, les services publics de distribution d'eau doivent établir un plan d'actions, avant la fin du second exercice suivant l'exercice pour lequel le seuil n’a pas été atteint.

Lorsque l’objectif du rendement du réseau de distribution d’eau n’est pas atteint, un plan d’actions  doit être mis en place par la collectivité locale. Il comprend notamment un suivi annuel de ce  rendement et, s'il y a lieu, un projet de programme pluriannuel de travaux d'amélioration du réseau.

En application du plan d'actions, le descriptif détaillé des ouvrages de transport et de distribution d'eau potable est mis à jour en indiquant les secteurs ayant fait l'objet de recherches de pertes d'eau ainsi que les réparations effectuées.

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Les chiffres mis en exergue ci-dessus rappellent la nécessité d’entretenir et de renouveler le patrimoine de canalisations en France. Les motifs sont à la fois économiques et environnementaux. En outre, plus on retarde ces investissements, plus la facture risque d’être lourde pour les prochaines générations.

S’appuyant sur l’inventaire, un objectif de renouvellement plus ambitieux doit être mis en œuvre pour être en adéquation avec la durée de vie des réseaux. Selon les observateurs, il devrait être à terme de l’ordre de 1,25% par an en moyenne nationale.

Pour se rendre compte de la réalité de l’ouvrage et de l’urgence  à investir dans la remise en état des réseaux d’eau, quelques chiffres suffisent. Sur les 906 000 km de canalisations d’alimentation en eau potable, 50 % seraient antérieurs à 1972. Les quatre matériaux : acier, fonte grise, PVC et amiante liés sont à l’origine des casses et des fuites et forment 60% de la valeur patrimoniale à remplacer.  Les fuites peuvent également provenir des terrains dans lesquels les tuyaux sont posés (tassements, vibrations et déformations subies par les terrains). D’après la dernière enquête « Eau et Assainissement » du ministère de l’Ecologie, l’extension du réseau se poursuit au rythme de 3 750 km par an, tandis que son renouvellement n’a été que de 5 041 km par an.

Fuites d’eau : 1 milliard de m3 d’eau encore perdu en 2015, soit l’équivalent du Lac d’Annecy ou de la consommation domestique annuelle de l’Ile-de-France

Au rythme actuel des investissements, il faudrait près de deux siècles pour remplacer les canalisations. Une canalisation d’eau potable ne serait changée qu’au bout de 170 ans (906 000 km par an / 5 041 km par an), alors que l’on estime entre 50 et 60 ans sa durée de vie selon la nature des tuyaux. Le taux de renouvellement est donc en moyenne de 0,6% par an. Les économies réalisées grâce à la réduction des fuites d’eau permettraient de renouveler 1 500 à 6 000 km supplémentaires de réseaux.

 

 

Au bilan, pour 2015:  Au plan de la connaissance du patrimoine, le taux de non-conformité est en baisse sensible (15% des services en 2015 contre 20% en 2014 et 34% en 2013).  Au plan de la maîtrise des fuites, avec 19% de services concernés en 2015, la non-atteinte du rendement seuil (rendement minimum à respecter par chaque service) reste stable par rapport à l’année précédente (20% en 2014). Parmi ceux-ci, ceux n’ayant pas élaboré de plan d’actions au 31/12/17 ont une majoration de redevance.  Entre 2010 et 2015, la stagnation absolue du taux moyen de renouvellement des réseaux d’eau, dans une période de durcissement de la réglementation, explique en partie la stabilité du taux de fuite au plan national (1 litre perdu sur 5, soit 1 milliard de m3 par an qui représente l’équivalent du volume du lac d’Annecy ou la consommation de toute l’Ile-de-France (environ 12 millions d’usagers) et traduit le retard pris par certaines collectivités dans les actions à mener pour l’amélioration de leur patrimoine.

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Marie-Charlotte Messier
Marie-Charlotte Messier

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